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L’empreinte hydrique numérique : comment les centres de données impactent la qualité et la gestion durable de l’eau

L’empreinte hydrique numérique : comment les centres de données impactent la qualité et la gestion durable de l’eau

L’empreinte hydrique numérique : comment les centres de données impactent la qualité et la gestion durable de l’eau

Comprendre l’empreinte hydrique numérique des centres de données

L’empreinte hydrique numérique est encore une notion méconnue du grand public. Pourtant, elle se cache derrière chaque e-mail envoyé, chaque vidéo en streaming, chaque requête sur un moteur de recherche. À l’heure où le numérique s’impose comme une infrastructure essentielle, les centres de données consomment non seulement beaucoup d’énergie, mais aussi beaucoup d’eau. Cette ressource, indispensable au refroidissement des serveurs, devient un enjeu stratégique, notamment dans les régions soumises au stress hydrique.

Comprendre comment fonctionnent ces centres, comment l’eau y est utilisée, puis rejetée, est essentiel pour évaluer l’impact de l’informatique sur la qualité de l’eau et sur la gestion durable des ressources hydriques. Cet article propose une analyse détaillée de l’empreinte hydrique numérique et des leviers disponibles pour la réduire.

Qu’est-ce que l’empreinte hydrique numérique ?

L’empreinte hydrique numérique désigne le volume total d’eau douce utilisée directement ou indirectement par les infrastructures numériques. Elle est généralement décomposée en trois volets :

Dans le cas des centres de données, l’empreinte hydrique est principalement associée au refroidissement des serveurs et à la production d’électricité qui les alimente. Elle se mesure en litres d’eau par kilowattheure (L/kWh) ou en litres d’eau par unité de données traitée (par exemple par Gigaoctet).

Pourquoi les centres de données consomment-ils autant d’eau ?

Les centres de données rassemblent des milliers, parfois des centaines de milliers de serveurs. Ceux-ci fonctionnent en continu, 24h/24. Ils génèrent une quantité considérable de chaleur. Pour éviter toute surchauffe, les exploitants utilisent des systèmes de refroidissement sophistiqués. Et l’eau est l’un des fluides les plus efficaces pour absorber et transporter cette chaleur.

On distingue principalement deux grandes familles de technologies de refroidissement :

Le choix de la technologie dépend de nombreux facteurs : climat local, coûts énergétiques, disponibilité de l’eau, exigences de performance. Dans les régions arides, l’utilisation d’eau pour refroidir des serveurs devient particulièrement controversée, surtout lorsque les besoins des populations et de l’agriculture entrent en concurrence avec ceux de l’industrie numérique.

Centres de données et gestion durable de l’eau

La question n’est plus seulement de savoir combien d’eau consomment les centres de données, mais comment cette eau est prélevée, utilisée, traitée et réinjectée dans le milieu. La gestion durable de l’eau suppose une approche globale, intégrant la ressource, les écosystèmes locaux et les usages concurrents.

Les opérateurs les plus avancés mettent en place des stratégies de réduction de l’empreinte hydrique qui reposent sur plusieurs axes :

Ces leviers s’inscrivent dans une logique de gestion intégrée de la ressource en eau, où le numérique n’est plus un simple consommateur, mais un acteur qui doit composer avec les autres usagers du territoire.

Impact des centres de données sur la qualité de l’eau

Au-delà des volumes consommés, l’impact sur la qualité de l’eau est un enjeu central. Les systèmes de refroidissement et de traitement peuvent générer des rejets qui modifient les caractéristiques physiques, chimiques ou biologiques des milieux aquatiques.

Les principaux risques liés aux centres de données sont :

La protection de la qualité de l’eau passe donc par des systèmes de traitement performants, une surveillance régulière et une transparence accrue quant aux pratiques des opérateurs. Des normes environnementales plus strictes se mettent progressivement en place dans plusieurs pays, encourageant des solutions plus sobres et plus propres.

Indicateurs de performance : PUE, WUE et empreinte hydrique

Pendant longtemps, l’efficacité d’un centre de données s’est mesurée presque exclusivement via le PUE (Power Usage Effectiveness), un indicateur de performance énergétique. Mais pour intégrer la dimension hydrique, de nouveaux indicateurs ont été développés.

De plus en plus d’opérateurs publient leurs données de WUE et communiquent sur leurs objectifs de réduction de l’empreinte hydrique des services numériques. Pour les entreprises et les institutions qui recourent à des services cloud, ces indicateurs deviennent des critères de choix, au même titre que le coût ou la sécurité.

Solutions innovantes pour réduire l’empreinte hydrique numérique

La pression croissante sur les ressources en eau pousse l’industrie du numérique à explorer des solutions innovantes. Certaines visent à réduire drastiquement la consommation d’eau, d’autres à optimiser son usage local ou à limiter l’impact sur les milieux.

Ces innovations ne sont pas uniquement technologiques. Elles s’accompagnent de nouveaux modèles économiques, de partenariats avec les collectivités locales et d’une meilleure intégration des centres de données dans la planification territoriale de l’eau.

Numérique responsable : rôle des entreprises et des utilisateurs

La réduction de l’empreinte hydrique numérique ne dépend pas uniquement des opérateurs de centres de données. Les entreprises utilisatrices de services cloud jouent un rôle clé à travers leurs choix technologiques, leurs critères d’achat et leurs politiques de responsabilité sociétale.

Plusieurs leviers sont à leur disposition :

Les utilisateurs finaux, quant à eux, peuvent adopter des pratiques de sobriété numérique : limiter le streaming continu, nettoyer régulièrement leurs boîtes mail, éviter de multiplier les appareils connectés sans nécessité. Individuellement, ces gestes semblent modestes. Collectivement, ils influencent toutefois la demande en puissance de calcul, et donc, indirectement, la pression exercée sur les ressources en eau via les centres de données.

Vers une gouvernance de l’eau intégrant le numérique

L’essor du cloud, de l’intelligence artificielle et de l’Internet des objets transforme durablement notre rapport aux données. Cette transformation doit s’accompagner d’une réflexion approfondie sur l’empreinte hydrique de l’infrastructure numérique.

Les décideurs publics commencent à intégrer les centres de données dans les politiques de gestion de l’eau. Autorisations de prélèvement, obligations de transparence, exigences de traitement des rejets, coordination avec les autres usages : autant d’outils qui permettent d’orienter le développement du numérique vers des modèles plus soutenables.

À terme, la question centrale est la suivante : comment concilier l’augmentation exponentielle des besoins en stockage et en calcul avec une gestion durable de l’eau et la préservation de sa qualité ? Les réponses seront à la fois technologiques, réglementaires et comportementales. Elles impliqueront les fournisseurs de services numériques, les entreprises utilisatrices, les citoyens, mais aussi les gestionnaires de l’eau, les collectivités et les scientifiques.

Faire émerger un numérique responsable vis-à-vis de l’eau est un chantier de long terme. Il suppose de mieux mesurer l’empreinte hydrique des centres de données, de rendre ces informations accessibles, et d’en faire un véritable critère de performance. Dans un monde où chaque goutte compte, l’infrastructure numérique ne peut plus s’extraire du débat sur la rareté de l’eau, la qualité des milieux aquatiques et la résilience des territoires.

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